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L'Oribus &
Histoire et société en Mayenne

L’ORIBUS N°73 – janvier 2009

De verdun à la captivité en Allemagne
Récit de la guerre 1914-1918
Auguste Périgois

Une forge encerclée par les chouans
Robert Kosmann

« Souvenirs du chevalier de la Broise »
De l’assassinat du duc de Berry à la naissance du comte de Chambord
Présentation de Philippe Vicente

Astillé au début du vingtième siècle
Une vie quotidienne d’un instituteur public
Jean Steunou

L’Oribus vous a donné rendez-vous:
Concours de nouvelles

1er prix : « Retour »  Marie Bouchet
2e prix : « L’Escabouis »  Françoise Bouchet
3e prix : « Sans titre »  Vincent Erault

Editorial

Après notre quinzaine « Loin du front » de novembre 2008, autour du thème de la guerre de 1914-1918 vue de la Mayenne, qui a mobilisé toute l’équipe de L’Oribus et de nombreux partenaires institutionnels, associatifs et particuliers – que nous remercions – Jocelyne Dloussky nous dresse un bilan illustré des différentes manifestations (expositions, rencontres, représentations théâtrales et cinématographiques, concerts…) qui ont commémoré le tragique événement fondateur du XXe siècle.
Sur le même thème, le présent numéro de L’Oribus propose aux lecteurs le « Récit de la guerre 1914-1918 » par un poilu mayennais, Auguste Périgois, originaire de Mézangers. Ce père de famille, mobilisé en novembre 1914, est envoyé au front dans la région de Verdun. Son récit, recopié à la fin de la guerre sur un petit carnet, présente un double intérêt. D’abord, alors que les témoignages de poilus « lettrés » foisonnent (et L’Oribus avait, dès ses premiers numéros publié les carnets de l’instituteur Auguste Georget puis, plus récemment les lettres et notes du brancardier Albert Filoche), il s’agit ici d’un récit fait par un paysan qui a reçu un minimum d’instruction primaire. On n’y trouvera donc pas de hautes considérations sur la conduite de la guerre, mais la description du quotidien des soldats dans les tranchées et les perpétuels déplacements des troupes. D’autre part, fait prisonnier le 23 février 1916 avec son unité, Auguste Périgois nous livre un témoignage unique sur la vie d’un « KG » français, d’abord dans un camp, puis dans un village au coeur de la Prusse. Il décrit la vie rurale dans une région bien différente de la Mayenne, les difficultés que vivent les populations allemandes à la fin du conflit, les petits bonheurs partagés avec ses camarades de captivité et l’attente interminable des lettres, des colis et de la fin de la guerre.

C’est précisément la fin de la guerre de 1914-1918 et plus précisément la journée du 11 novembre 1918 qui était l’objet du concours de nouvelles organisé par l’Asociation des Amis du Livre et de la Bibliothèque municipale de Laval. Nous publions ici les trois premiers prix. Les récits de Marie Bouchet, Françoise Bouchet et Vincent Erault s’accordent parfaitement entre eux. Malgré le retour à la paix, pas d’allégresse et de joie cocardière ; mais le retour d’un père traumatisé et silencieux, d’une « gueule cassée » qui refuse de se faire reconnaître par les siens, la naissance d’un enfant qui ne connaîtra jamais son père…

C’est vers une autre période également troublée que Robert Kosmann nous entraîne. À partir de 4 lettres retrouvées aux Archives nationales, qui datent de la fin de la Convention et du début du Directoire, en 1795, l’auteur tente d’éclaircir les relations entre Bleus républicains et Blancs chouans autour des forges de Moncors à Chammes. Ces lettres, rédigées par le régisseur, Besnard, par ailleurs chef de légion du district d’Évron, donnent un éclairage essentiel sur une « forge nationale » productrice d’un matériau stratégique de première importance dans le contexte de la guerre européenne conduite depuis 1792, et qui vit sans cesse sous la menace d’attaque des Chouans très nombreux dans cette région forestière de la Charnie. S’agit-il encore une fois de la traditionnelle opposition entre ville et campagne, ouvriers et paysans ?

Sous la houlette de Philippe Vicente, nous retrouvons le chevalier de la Broise qui continue de mener une vie mondaine à Paris en tant que garde du corps du roi Louis XVIII. Pourtant, cette année 1820 va être fertile en événements marquants, en particulier pour la dynastie des Bourbons. Dans une Europe qui aspire a plus de liberté, notre chevalier décrit le climat de colère qui l’anime à l’annonce de l’assassinat du duc de Berry, poignardé par « une idée libérale ». Notre homme se dit « royaliste », ce qui le classe dans la catégorie des Ultras qui exigent le départ du premier ministre Decazes jugé responsable, par sa politique trop libérale, du trépas du fils cadet du futur Charles X. Le chevalier de la Broise décrit aussi le climat d’agitation qui entoure le vote au Palais-Bourbon de la loi électorale de juin 1820 qui accorde un double vote aux contribuables les plus riches ! Avec ses camarades de garnison, il participe à des actions d’intimidations autour de la Chambre qui ne sont pas sans préfigurer celles les ligues des années 1930. L’année se termine avec la naissance du comte de Chambord, l’« enfant du miracle ». À l’occasion de son baptême, une grande fête est organisée à Versailles. L’aristocratie d’Ancien Régime y brille encore de tous ses feux. Les derniers ? Moins de 100 ans après, cette aristocratie agit encore en Mayenne, mais en sous-main. Jean Steunou décrit les démêlés d’Alexis Ledauphin, l’instituteur d’Astillé nommé en 1908 avec le maire à propos d’une branche de cognassier coupée lors des préparatifs de la Fête-Dieu. L’arbre est-il situé dans la cour de récréation de l’école ou sur un terrain privé ? Cette affaire prend rapidement des proportions inattendues qui nécessitent le déplacement d’un inspecteur délégué par l’inspecteur d’académie pendant que le village se partage entre laïcs soutenus par quelques commerçants et cléricaux influencés par les châtelains locaux. Dans ce contexte, le quotidien de l’instituteur public est bien difficile en ce début de XXe siècle.

Signalons enfin qu’après 17 années à la tête du groupe, Jacques Cousin a souhaité passer la main à un nouveau président. Catherine Le Guen a accepté cette responsabilité. Jacques, que nous remercions, devient donc notre président d’honneur.

Rémy Foucault